Résumé de Jacques Leclerc, chap. 14, «Le fonctionnement du lexique»
— La signification réside-t-elle dans le lexème isolé? Dans le contexte linguistique? Dans la situation de communication? Dans nos connaissances culturelles? Dans le monde réel? Dans nos présuppositions? A-t-on jamais fini d’apprendre toute la signification d’un mot?
Réponse: la signification réside dans toutes ces dimensions; il est possible de ne jamais saisir toute la signification d’un mot, puisqu’il pourrait toujours figurer dans un nouveau contexte.
— Que veut dire le mot canal sans contexte? Impossible de préciser! Faites une liste des possibilités: Canal Welland, canal de télévision, canal auditif. Comment interprétez-vous l’énoncé suivant: Canal sera soir partie samedi diffusée hockey le de la au deux (p. 191).
Réponse: Cette phrase est difficilement interprétable, puisque la syntaxe n’est pas respectée; il s’agit plutôt d’un tas de mots désorganisé.
— Inséparabilité de la sémantique (= sens) et de la syntaxe (= structure et organisation formelle de la phrase). À preuve, les énoncés suivants:
*Mes droubles lirpes blappent dans la girtaine.
*Mes vertes idées et incolores dorment furieusement.
*Le numéro que j’ai composé était à la fois bon et mauvais.
*Bois ton steack et mange ton lait!
*Après avoir tué sa femme, il l’a enterrée vivante.
*Il tenait ses culottes d’une main et courait de l’autre.
*Tout ce qui est vrai est faux.
— On ne retient qu’un seul sens à la fois, exemple du mot table (p. 192). Les lexèmes n’ont de signification véritable que dans un énoncé, lorsqu’ils sont bien assis et contextualisés, sur le double plan contexte linguistique et contexte situationnel.
— La grammaire est un système fermé et fini; il faut la connaître dans sa presque totalité. Les petits maîtrisent l’essentiel de la grammaire avant même d’aller à l’école; tout le reste, ce ne sont que des retouches, des perfectionnements.
— Le lexique est un système ouvert et infini; on peut toujours créer ou ajouter un nouveau terme. D’où l’impossibilité de maîtriser le lexique d’une langue dans son intégrité. Combien de mots nouveaux, combine de sens nouveaux rencontrez-vous chaque jour? Si par hasard votre réponse est «aucun», êtes-vous sûr d’être vivant?
— Différents besoins, différents types de dictionnaires. Tour d’horizon. Naïf principe de structuration de la plupart des dictionnaires: l’alphabet. Ce principe d’organisation simpliste cache ou obscurcit les liens sémantiques qui existent entre des lexèmes apparentés par leur sens. Y a-t-il des dictionnaires qui reflètent d’autres principes d’organisation? Réponse: Il y a des dictionnaires de synonymes et d’antonymes, des dictionnaires organisés par «familles de mots». Cette organisation peut être de nature sémantique (p. ex., dictionnaire des mots désignant les meubles et l’ameublement) ou de type morphologique (p. ex., dictionnaire des mots obtenus par dérivation et composition. Comment fonctionnent les dictionnaires sur Internet? Réponse: Alphabétiquement, j’imagine, d’après ceux que j’ai pu consulter, mais on n’a pas besoin de tourner les pages. Vous pourriez tester cette hypothèse à partir de la page que voici!
— Georges Gougenheim et le «français fondamental». Objectif: décrire le vocabulaire indispensable à la vie quotidienne; faciliter l’apprentissage du français aux non francophones. Situation historique: l’après-guerre,
époque de la décolonialisation, fin de l’empire français. Malheureusement, le français fondamental a eu relativement peu d’incidence sur le système scolaire dans les pays francisants ou francophiles.
Il faut reconnaître que le succès et l’extension d’une langue sont beaucoup plus qu’une question de fréquences lexicales ou de structuration du lexique en familles de mots, champs sémantiques, synonymiques ou autres. De quels autres facteurs faut-il tenir compte? Réponse: Il faut tenir compte de l’importance culturelle, idéologique, économique et militaire d’une langue et de la société qu’elle représente. Des facteurs qui favorisent ou qui défavorisent la diffusion de cette langue.
— Quelle sorte de lexèmes et de morphèmes trouve-t-on sur la liste des 1000 mots les plus fréquents de la langue française? Réponse: Surtout des morphèmes comportant une valeur grammaticale (p. ex., je, mon, avoir, être) et des mots relativement vides de sens (chose, faire). Y a-t-il par hasard des francophones qui ne maîtrisent pas cette composante du lexique? Réponse: Sûrement pas!
— Au delà du français fondamental, il y a le soleil du lexique (concept associé au nom de Paul Rivenc, «Lexique et langue parlé» dans La grammaire du français parlé, Paris: Hachette, 1971).
— Les quatre composantes du «soleil»: le noyau des mots fréquents, les mots disponibles, les lexiques semi-spécialisés, les lexiques spécialisés. Le contenu de chaque composante peut varier avec l’individu, sous cette réserve que les mots fréquents sont à peu près les mêmes pour tous les francophones.
— Ces quatre composantes sont liées d’un côté au concept de la fréquence d’emploi, de l’autre au niveau de scolarisation de l’individu et à ses domaines de spécialisation intellectuelle ou professionnelle.
— Le lexique varie selon les besoins communicatifs, l’âge ou le sexe du locuteur, selon ses circonstances sociales, sa région d’origine, son métier ou profession etc. Il en va de même de sa prononciation.
Quelques questions:
Leclerc p. 413, Questions 1-7 et les suivantes…
1) Difficilement, mais on peut substituer des lexèmes par ci par là. Il s’agit alors d’emprunts à l’autre langue.
2) Parce que que le lexique est infini. On peut toujours créer un nouveau mot, ou ajouter un nouveau sens à un mot qui existe déjà.
3) Théoriquement, un dictionnaire de la langue contiendrait tous les mots de cette langue; il serait énorme! Un dictionnaire de la parole exclurait tous les mots qui ne sont pas courants, donc tous les mots spécialisés. Quant aux mots semi-spécialisés, il y aurait lieu peut-être de les indiquer par un sigle, soit SS.
4) Non, parce que tous les éléments de la grammaire (=la morphosyntaxe) sont fréquents, donc tous sont importants.
5) Le principe de la fréquence est important pour l’apprentissage d’une langue. Si l’on ne saisit pas la différence entre les mots fréquents et les mots rares, sa maîtrise de la langue sera artificielle. D’ailleurs, les mots les plus fréquents sont aussi des éléments de la grammaire et, sans grammaire, on aura sûrement du mal à s’exprimer.
6) Fréquents 1,000 (p. 198), disponibles 8,000 (p.194), semi-spécialisés 25,000 (p. 199), spécialisés (tous les autres, la liste est théoriquement infinie)
7) monotone (musique, couleur, vie, conférence, etc.), automatique (transmission, réflexe, réaction, distributrice), lexique (dictionnaire bilingue abrégé, dictionnaire de la langue propre à un auteur, à une science, à une activité, ensemble des mots appartenant au vocabulaire d’un auteur, d’une époque, d’une science, d’une activité, Syn. vocabulaire, en linguistique: ensemble des mots d’une langue.
Les réponses figurent entre crochets:
1) À quelle composante du soleil pourrait-on rattacher les mots suivants: je suis [fréquent], l’ostéoporose [semi-spécialisé], l’ostéoclasie [spécialisé], per stirpes [spécialisé], fourchette «instrument de cuisine» [disponible], fourchette d’âge «gamme» [semi-spécialisé],infarctus [semi-spécialisé], isobare [spécialisé], disque dur [disponible], puce (insecte) [disponible], puce (microprocesseur) [semi-spécialisé], souris (dispositif d’ordinateur) [disponible], cybernautes [semi-spécialisé], cravate [disponible], ornithologue [semi-spécialisé], asocial [disponible], assiette [disponible], barbe à papa [disponible]?
2) Si vous deviez composer un dictionnaire de la langue parlée, quelle sorte de lexèmes y mettriez-vous? Que feriez-vous des termes semi-spécialisés? [Réponse: Je mettrais tous les mots fréquents et tous les mots disponibles. Quant aux termes semi-spécialisés, je les marquerais SS.]
3) Expliquez en vos propres termes pourquoi un individu n’aura jamais terminé son apprentissage du lexique. [Réponse: Parce qu’il est toujours possible d’ajouter un nouveau sens à un mot existant. Parce qu’on peut toujours créer un nouveau mot pour désigner une nouvelle réalité. Le lexique est une liste ouverte et infini.]
4) Dans quels domaines crée-t-on le plus de mots nouveaux? [Réponse: Surtout dans les domaines où il y a beaucoup d’innovations. Dans les sociétés capitalistes, cela veut dire surtout les nouvelles technologies.]
5)Y a-t-il des domaines lexicaux morts ou moribonds? [Réponse: Quand une manière de vivre ou une technologie disparaît, la terminologie associée disparaît aussi. Au Canada, par exemple, les unités de mesure impériales ont été remplacées par des unités métriques, au cours des 25 dernières années. Ainsi, les termes pouce, pied, verge, pinte, chopine, gallon, boisseau, acre, mile, etc.disparaissent.]
6) Pourquoi est-il impossible de donner une réponse satisfaisante aux questions suivantes: Que veut dire le mot [so]? [Réponse: Parce qu’il y a plusieurs mots homophones qui partagent cette prononciation: seau, sceau, sot, saut. Que veut dire le mot canard? Réponse: Ce mot a acquis des sens multiples, p. ex., «l’oiseau lui-même, la chair mangeable de cet oiseau, journal, bouilloire, fausse note, fausse nouvelle ou rumeur et même, récemment, canard de toilette».]