March22

Notes du cours AS/FR 2100 6.0: Initiation à la description linguistique du français / Introduction to the Linguistic Study of French

Semaine du 22 mars

Chapitre 19: Synonymie, antonymie, polysémie


Avant d’aborder le chapitre 19, nous terminerons le chapitre 18, versets 13,14 et les questions 8b et 11. Puisque le chapitre 19 est relativement facile, j’aimerais qu’on travaille davantage les questions cette semaine.

Donc, je vous invite à préparer à l’avance vos réponses aux questions qui figurent en bas de cette page.

Verset 1: La synonymie.

Les parfaits synonymes n’existent pas. Il y a généralement une nuance, une valeur, une connotation socioculturelle qui permet de les distinguer. P. ex. un homme (neutre) vs. un bonhomme (légèrement péjoratif).

Verset 2: Les quasi-synonymes (= les parasynonymes).

Ainsi, les quasi-synonymes partagent un certain nombre de sèmes, comme on le voit dans la grille sémique. Écolier, lycéen, étudiant partagent les deux sèmes [+ humain, + apprenant], mais le sémème de chaque lexème est différent de tous les autres.

Verset 3: Les doublets.

On a déjà vu ce phénomène où un seul étymon, un seul terme d’origine (latine ou grecque), donne deux lexèmes différents en français. Dans certains cas, le sens de l’un de ces termes a tant changé avec le passage du temps qu’on n’a plus une impression de synonymie. Le lien sémantique entre la forme savante et la forme populaire a été «rompu». Tel est le cas de:

Étymon forme savante forme populaire
SECURITATEM sécurité sûreté
LIBERARE libérer livrer
NATALEM natal Noël
LEGALEM légal loyal

Verset 4: Les variantes synonymiques.

Les termes dits «quasi-synonymiques» s’emploient en fait dans des contextes (linguistiques, situationnels ou socioculturels) différents. Tel est le cas de: le mort, le défunt, le décédé, feu mon père, mon pauvre père, le regretté, le cher disparu, etc.
Question: Dites quelle(s) nuance(s) linguistiques, situationnelles ou socioculturelles séparent les termes suivants: garçon, gars, môme, ado, gône, flo, gamin, jeune homme.

Verset 5: L’antonymie lexicale.

Deux catégories: les antonymes polaires (qui s’opposent absolument) et les oppositions scalaires (qui représentent des gradations).
Exemples d’antonymes polaires: blanc ~ noir, grand ~ petit, gentil ~ méchant, vrai ~ faux. Un objet qui est blanc et grand ne peut pas être noir et petit en même temps. On ne peut pas être gentil et méchant en même temps. Une réponse qui est vraie n’est pas fausse en même temps. L’emploi d’un de ces termes exclut absolument l’autre.
Exemple d’oppositions scalaires: frigide, glacé, froid, frais ~ infernal, brûlant, chaud, tiède. Deuxième exemple: jeune ~ vieux. Connaissez-vous des jeunes qui sont plus vieux que les vieux? Des vieux qui sont plus jeunes que les jeunes? À quel moment commence la vieillesse? Quand finit la jeunesse? Nous avons affaire, non pas à une opposition absolue, mais à une opposition scalaire.

Verset 6: L’antonymie et les clichés.

Les expressions imagées, métaphoriques, métonymiques ou usuelles échappent à la stricte analyse sémique, nous l’avons déjà vu. Alors qu’elles sont entrées dans l’usage courant, on les appelle des clichés. En général, les clichés n’acceptent pas l’antonymie. Exemples:
C’est une vraie tête de mule ~ * C’est un vrai pied d’agneau.
J’ai eu chaud! (= j’ai eu peur) ~ *J’ai eu froid!
C’est un chaud lapin, lui! ~ *C’est un froid lapin, lui!
Il fait un froid de canard! ~ * Il fait un chaud de canard!
Je n’en reviens pas! (= j’en suis profondément étonné) ~ *J’en reviens!
Ils filent le parfait amour (= ils s’aiment passionément) ~ *Ils filent la parfaite haine. ~ *Ils défilent le parfait amour.
C’est un drôle de pastis! ~ * C’est un drôle de Cointreau!

Verset 7: L’antonymie morphologique.

Lorsqu’il s’agit de négation, l’antonymie réside souvent dans la morphologie.
– Les principaux morphèmes négatifs liés sont: a-, anti-, contre-, dés- (var. dé-), et in- (vars. im-, il-, ir-). Illustrez chacun par un exemple.
– Les principaux morphèmes libres sont: non, sans et pas de. Les statut du morphème non est quand même discutable, puis qu’il s’écrit en principe avec trait d’union devant les noms (non-violence, non-fumeurs, non-sens), il hésite devant les adjectifs (non(-)engagé, non(-)violent, non(-)négligeable, plaider non coupable), et parfois il fait corps avec le lexème: nonchalance, nonchalant, nonobstant, nonpareil).
– Le morphème sans s’écrit avec un trait d’union lorsqu’il se combine avec un substantif pour faire avec lui une unité de sens: les sans-abri, sans-coeur, sans-gêne, sans-culotte, sans-logis, sans-souci, sans-travail, sans-soin, sans-le-sou, etc.
Ici, nous sommes à la limite entre le morphème libre et le morphème lié.

Verset 8: La polysémie.

En général, le signifiant n’a pas un seul signifié, mais plusieurs. Le signifié peut varier selon le contexte linguistique et le contexte situationnel. On appelle ce phénomène la polysémie (= plusieurs + sens). Question: Donnez tous les sens possibles des lexèmes suivants: fille, franc, valet, mouton, lapin.

Verset 9: L’homonymie.

    • Première catégorie, l’homophonie (= deux lexèmes ont le même signifiant sonore, mais des signifiés différents, comme p. ex., sain(s), saint(s), sein(s), seing; ou sans, sang, cent, ou encore seau, saut, sot, sceau; ver, vers, vert, verre, vair. Dans ce cas, on parle d’homophones (= mots ayant la même prononciation, mais des sens différents).
    • Deuxième catégorie: l’homographie (= deux lexèmes qui ont chacun leur signifiant sonore propre et leur signifié propre, p. ex., portions (sbs. f. pl) et portions (vb. à la 1re personne de l’imparfait), couvent (sbs. m. sg.) et couvent (vb. à la 3e personne du pluriel, présent de l’indicatif). Dans ce cas, on parle d’homographes (= mots ayant la même orthographe, mais des prononciations différentes et des signifiés différents.
    • Ainsi, le terme homonyme est un terme général qui embrasse à la fois les homophones et les homographes.
    • Dans quelques rares cas, les lexèmes peuvent être homophones et homographes à la fois, p. ex., son «résidu de la mouture du blé», son «bruit» et son «déterminant et adjectif possessif».

Verset 10: Champ notionnel (=conceptuel), champ lexical et champ morphologique.

Voilà trois façons de regrouper les mots en «familles».
Champ notionnel: (mots regroupés autour d’un même sème ou sémème), soit
«lieu d’habitation humaine construit ou fabriqué par des humains»: cabane, cottage, chalet, isba, pavillon, tente, bloc-appartements, gratte-ciel, etc.
Champ lexical: (défini par un mot-thème ou un mot-clé), soit la cuisine:
repas, nourriture, appareils ménagers, table, chaises, fourchette, coûteau, cuillère, évier, robinet, vaisselle, etc.
Champ morphologique: La liste de tous les termes qui partagent un même trait de morphologie, soit un affixe (préfixe, suffixe, flexion), soit un même radical.
– Tous les mots portant un même préfixe, soit re- (vars. ré-, r-): revoir, ravoir, réviser, etc.
– Tous les noms portant un même suffixe, soit -age: bavardage, étiquettage, etc.
– Tous les adverbes portant le même suffixe, soit -ment:rapidement, lentement…
– Tous les mots formés à partir du radical imprim-: imprimeur, imprimante, imprimerie, imprimer, imprimés, etc.
– Toutes les formes verbales à partir du même radical, soit port-: je porte, tu portes
– Toutes les formes verbales portant la même flexion, soit -ez: dansez, allez…

Verset 11: Les variations stylistiques.

L’analyse sémique permet de préciser le sens premier ou le sens propre des mots, et ainsi d’en procurer des définitions claires et simples. Par contre, l’examen de l’antonymie, la synonymie et la polysémie révèle que beaucoup de nuances échappent à la simple analyse sémique. Les exemples fournis en verset 11 sont là pour vous prouver que la langue est rarement neutre, et qu’elle varie selon des paramètres de type (populaire vs. savant, neutre vs. soutenu, négligé vs. recherché, peuple vs. snob, standard vs. régional, récent vs. ancien, affiliation sociale, professionnelle ou idéologique, etc.)

Verset 12: L’analyse sémique des métaphores.

Même si l’analyse sémique des métaphores se révèle problématique, il est généralement facile d’identifier un sème qui domine, et qui donne ainsi force et vie à la métaphore. Dans les exemples suivants, identifiez le sème qui domine.
Vous êtes un vrai lion, vous! [+force]
Cette femme est une vraie tigresse! [ ]
Alors mon loup, qu’est-ce qu’on fait ce soir? [ ]
Alors mon petit chou, tu t’es fait mal?[ ]
Mon meilleur ami est un véritable panier percé! [ ]
J’ai fait mes calculs sur le dos d’une enveloppe. [ ]
Après moi, le déluge! [ ]
Les sanglots longs des violons de l’automne… [ ]
Il fait le joli coeur. [ ]
C’est une perle, cette fille! [ ]
n drôle de zèbre, celui-là! [        ]


Ben…, les voici!

P. 190, Q. 2: Dans les synonymes suivants, identifiez le sème qui permet de différencier le terme neutre de l’autre. Posez-vous la question: Quelle est la différence entre manger et bouffer, etc.

manger ~ bouffer; manger ~ dévorer; manger ~ croquer
boire ~ se désaltérer; boire ~laper; boire ~picoler
courir ~galoper; courir ~cavaler

P. 190, Q. 2: Dans les synonymes suivants, identifiez le sème qui permet de différencier le terme neutre de l’autre. Posez-vous la question: Quelle est la différence entre une habitation et une maison, etc.

habitation ~ maison; habitation ~ logis; habitation ~ demeure.
boire ~se désaltérer; boire ~laper; boire ~picoler
fou ~ aliéné; fou ~ cinglé; fou ~ dément, fou ~ timbré, fou ~ piqué

p. 190 Q. 5: Trouvez les termes courants qui correspondent au termes savants que voici: apostasie, apoplexie, argutie, concaténation, diachronique, dystomie

p. 190 Q. 5: Trouvez les termes courants qui correspondent au termes savants que voici: ergastule, gigantomachie, tauromachie, hiératique, hyperbole, céphalgie, infarctus

p. 190 Q. 9: Parmi les préfixes qui suivent, encerclez ceux qui expriment
a) la qualité
b) la quantité
mal-, mé-, homo-, intro-, avant-, sous-, sur-, hyper-, hypo-, uni-, mono-, micro-, maxi-, paléo-, néo-, poly-, multi-, méga-, mini-, rétro-, néo-, infra-, in-, ex-, a-, caco-, ortho-, égo-, philo-, pro-, brachi-, dolicho-

p. 190 Q. 9: Parmi les préfixes qui suivent, encerclez ceux qui expriment
a) la temporalité
b) la spatialité
mal-, mé-, homo-, intro-, avant-, sous-, sur-, hyper-, hypo-, uni-, mono-, micro-, maxi-, paléo-, néo-, poly-, multi-, méga-, mini-, rétro-, néo-, infra-, in-, ex-, a-, caco-, ortho-, égo-, philo-, pro-, brachi-, dolicho-

p. 190 Q. 9: Parmi les préfixes qui suivent, encerclez ceux qui expriment
a) la grandeur
b) l’identité
c) la négation
mal-, mé-, homo-, intro-, avant-, sous-, sur-, hyper-, hypo-, uni-, mono-, micro-, maxi-, paléo-, néo-, non-, poly-, multi-, méga-, mini-, rétro-, néo-, infra-, in-, ex-, a-, caco-, ortho-, égo-, philo-, pro-, brachi-, dolicho-

p.191, Q. 12. Donnez les différents sens qui correspondent aux mots polysémiques que voici: valet, mouton, lapin (Verset 8)

Dites quelle(s) nuance(s) linguistiques, situationnelles ou socioculturelles caractérisent ou séparent les termes suivants: garçon, gars, môme, ado, gône, flo, gamin, jeune homme (Verset 4). Suggestion: Posez-vous la question: quelle est la différence entre un garçon et un gars? Entre un garçon et un môme? Etc.

À partir de la série d’exemples suivants, expliquez pourquoi le contraire n’est pas possible (Verset 6):

C’est une vraie tête de mule ~ *C’est un vrai pied d’agneau.
J’ai eu chaud! (= j’ai eu peur) ~ *J’ai eu froid!
C’est un chaud lapin, lui! ~ *C’est un froid lapin, lui!
Il fait un froid de canard! ~ *Il fait un chaud de canard!
Je n’en reviens pas! (= j’en suis profondément étonné) ~ *J’en reviens!
Ils filent le parfait amour (= ils s’aiment passionnément) ~ *Ils filent la parfaite haine. ~ *Ils défilent le parfait amour.
C’est un drôle de pastis! ~ *C’est un sobre de pastis!

Polysémie: Donnez les sens possibles des termes suivants: fille, franc, valet, mouton, lapin. (Verset 8)

Expliquez brièvement la différence entre un champ notionnel (=conceptuel), un champ lexical et un champ morphologique. (Verset 10)

Dans les exemples suivants, identifiez le ou les sème(s) qui domin(ent).

Vous êtes un vrai lion, vous! [+force]
Cette femme est une vraie tigresse! [ ]
Alors mon loup, qu’est-ce qu’on fait ce soir? [ ]
Alors mon petit chou, tu t’es fait mal? [ ]
Mon meilleur ami est un véritable panier percé! [ ]
J’ai fait mes calculs sur le dos d’une enveloppe. [ ]
Après moi, le déluge! [ ]
Les sanglots longs des violons de l’automne… [ ]
Il fait le joli coeur. [ ]
C’est une perle, cette fille! [ ]
C’est un drôle de zèbre, celui-là! [ ]

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