Notes du cours AS/FR 3130 6.0: Sémantique et lexicologie du français / French Semantics and Lexicology
Notes sur Aurélien Sauvageot, Portrait du vocabulaire français, «L’autonomie des mots» (68-75)
Résumé:
En règle générale, les «mots pleins» sont beaucoup plus autonomes que les mots-outils. Ces derniers dépendent syntaxiquement des premiers, p. ex., je ne le lui ai pas dit cela (où les six premiers termes sont syntaxiquement dépendants et les deux derniers relativement autonomes).
Dans ce chapitre, l’auteur concentre son attention sur l’autonomie variable des mots pleins. La combinatoire de ces derniers est sujette à des restrictions de sélection, de type sémantique. Prouvez par des exemples que le verbe manger connaît des restrictions d’ordre sémantique et précisez laquelle/lesquelles.
Certains mots tels que saur, hère, ballant, hagard, bée, stentor, rédhibitoire, fétu n’ont pratiquement pas d’autonomie. Expliquez pourquoi.
Quelles sont les caractéristiques d’un cliché (= une locution stéréotypée, une formule figée)? Quelle en est l’importance pour un-e francisant-e?
Trouvez, si possible, d’autres formules de type verbe + nom (sans article): faire connaissance, faire dodo, prendre connaissance, perdre connaissance, rendre justice, mener guerre, fermer boutique. Que pourrait-on dire concernant la productivité de cette formule en français? Sur l’aptitude des infinitifs à se combiner étroitement avec un nom sans qu’un déterminant intervienne?
Que peut-on dire sur la distribution des «synonymes» an(s) ~ année(s)? Le choix de l’un ou de l’autre est-il sans restrictions? Dans la négative, quelles en sont les restrictions?
L’usage qu’on fait d’une langue a pour effet d’élargir l’autonomie des mots en libérant ceux-ci des entraves qui les tiennent attachés à d’autres termes, ou à un nombre strictement limité de contextes linguistiques. Montrez la vérité de cette affirmation à partir des exemples cruel et sanglant.
Plus le sens d’un mot est précis, plus le mot sera confiné dans une aire étroite et plus il connaîtra des restrictions contextuelles. Par contre, plus le sens du mot est étendu, plus il connaîtra de l’autonomie. Prouvez cette affirmation par rapport aux mots perpétrer, bée, pondre, stentor vs. faire, prendre, chose. Que peut-on dire sur l’autonomie des mots dégager, crucial, incontournable?
Sur le plan historique, on peut dire que certains mots connaissent des extensions de sens et d’emploi contextuel, d’autres des restrictions de sens et d’emploi. Citez un exemple de chaque type.
L’autonomie des mots «pleins» est déterminée par une multiplicité de facteurs, dont l’évolution historique (extensions et restrictions de sens), le style littéraire traditionnel (favorisant des formules figées), l’usage quotidien qu’on fait de la langue, les restrictions de sélection gouvernant la combinatoire des mots, la tendance à préférer des termes vagues, à sens large ou bien…, au contraire, des mots précis, à sens étroit. Si l’usage «indiscipliné» recourt volontiers aux termes à sens large, l’usage scientifique préfère des mots à sens étroit.
L’essentiel, c’est de savoir différencier les contraintes (= limites) sémantiques strictes (on ne peut pas manger de l’eau, ni boire un steak) des limites souples (on peut faire, commettre, ou perpétrer un crime, on peut parler d’une cruelle ou d’une grande déception). À l’intérieur des clichés proprement dits, les possibilités de substitution sont relativement limitées. Pour hareng saur, on peut dire hareng fumé, mais pas *maquereau ou saumon saur, par exemple. De même, bouche bée vaut bouche grande ouverte, mais *les narines bées ne se dit pas.
Et, enfin, on peut pondre un oeuf, mais pas un boeuf. Mais, à bien y réfléchir, pourrait-on pondre une idée? Au figuré bien entendu. Question à pondérer…