Jan25

Cours AS/FR 2100 6.0: Initiation à la description linguistique du français / Introduction to the Linguistic Study of French

Chapitre 13: La dérivation et la composition

    • Texte entier plus questions 1-12. Nous ferons un peu moins de notes magistrales et un peu plus de travaux pratiques (à partir des questions prévues).
    • Mon docteur a occupé toute mon attention cet après-midi le 20 janvier. Par bonheur ou par malheur, je n’ai ni docteure ni *docteuse, ni doctoresse ni *doctorette, encore moins une *doctatrice, mais un simple médecin omnipraticien, qui veille sur moi.
    • Si vous voulez que la révision pour le test #3 soit utile, donnez-moi vos questions par écrit ou en personne ou par courriel au plus tard le 29 janvier. Plus vos questions seront précises, plus la révision vous sera utile.

Verset 1:

Revoir, s.v.p., les définitions de mot et monème, lexème et morphème (Chap. 10). Les mots simples sont ceux qui comportent un seul lexème, donc les monèmes radicaux (prince), les mot contenant un lexème et un ou plusieurs morphèmes (grand-e-s), et les abbréviations (photo). Citez pour chaque catégorie un autre exemple qui n’est pas donné par les auteurs.

    • Les mots dérivés ajoutent un préfixe ou un suffixe à un lexème de base (= une base lexicale): fleur-iste, dés-agréable. Citez un exemple de préfixation et de suffixation qui n’est pas donné par les auteurs.
    • Les mots composés sont faits de deux ou plusieurs lexèmes. Il y a deux types: les mots composés français (tire-bouchon, bureau de poste) et les mots composés savants. Ces derniers sont d’origine latino-grecque (démocratie, cardiologie, laparoscope, psycholinguistique). D’autres mots composés suivent le modèle savant, mais leurs monèmes sont d’origine française (autoroute, abribus, musicassette, autoneige, motoneige). Trouvez un autre exemple pour chaque catégorie.

Verset 2:

Ce que je viens d’appeler lexème (=base lexicale) est présenté ici comme terme de base. Formules: affixe + terme de base = terme dérivé (re-faire). Ou encore: terme de base + affixe = terme dérivé (lav-age). Ou encore: affixe + terme de base + affixe + affixe (re-verd-isse-ment). Re- «encore, à nouveau», verd- «couleur verte», -isse- «devenir ce que la base lexicale signifie», -ment «suffixe nominal désignant un processus». D’autres exemples: rendement, médicament, enchantement, abaissement.

    • L’opération de dérivation implique un certain ordre, p. ex., à partir de la base lis, on a: lisible – illisible – illisiblement – illisibilité. À supposer que le [z] de lis ne se prononce jamais devant une consonne, on peut même dériver l’infinitif ainsi: lis-re > lire.
    • Pour le moment, vous pouvez oublier le terme racine.

Verset 3:

Ce verset complique inutilement la matière. Retenez bien le fait que affixe et affixation sont des termes généraux qui regroupent l’addition de préfixes, de suffixes et de flexions. Alors que les préfixes et suffixes ont généralement un sens plein ou «lexical», les flexions ont plutôt une valeur grammaticale. Exemples de préfixes et suffixes: re-faire «répétition, reprise, à nouveau», dés-habiller «faire le contraire de ce que signifie le terme de base», lav-age, rinç-age, séch-age «action ou procès», véri-té, clar-té, fausse-té (qualité plutôt abstraite). Exemples de flexions verbales: mange-ons, mang-ez, mang-ent, mange-ais, mang-é. Exemples de flexions nominales: grand-e-s.

Verset 4:

Définition du préfixe:
a) lié au terme de base, b) précède le terme de base, c) modifie le sens du terme de base, d) ne change pas la catégorie grammaticale du terme de base, e) est polyvalent en ce sens qu’il peut se combiner avec des termes de base appartenant à plusieurs catégories morphologiques, comme le prouvent très bien les exemples suivants: décontracter (verbe), déloyal (adjectif), démystification (substantif), défavorablement (adverbe). Quel est le sens de base de dé-?

Verset 5:

Les préfixes séparables ont généralement une vie autonome comme prépositions ou adverbes. Utilisés comme préfixes, ces éléments s’écrivent avec un trait d’union dans le cas des substantifs (avant-midi, après-midi, non fumeurs, non buveurs), sans trait d’union dans le cas des adjectifs (non euclidien, non figuratif, les personnes non inscrites, les bouteilles non consignées), parfois il sont liés directement au terme de base (poursuivre, surestimer, nonobstant, hypersensible). Cela est une pure convention de la langue écrite, une question d’orthographe arbitraire.
Les préfixes inséparables sont en général des emprunts savant au grec et au latin. Établis depuis des siècles, il n’apparaissent jamais seuls: hypothermie, supermarché, irresponsable, hyperactif, subjacent, illisible, irresponsable, inactif, superstructure, infrastructure.

    • Selon une tendance moderne, on transforme certains de ces préfixes en adjectifs (il est super, c’est extra, le monde est hyper) ou en substantifs (j’achète du super, je fais des extras). On parle alors de la lexicalisation de ces termes. Effectivement, on risque de les trouver comme entrées de dictionnaire.

Verset 6:

Classement sémantique des préfixes:
Pour chaque catégorie sémantique, citez un autre exemple qui ne figure pas dans le livre:
privatif (désorganiser, démêler, ), factitif (enfourner, enclencher, ), itératif (revoir, ravoir, ), privatif (incapable, illégal, ), intensif (hypersensible, hyperactif, ), temporel (préhistorique, postuniversitaire, ), spatial (transcanadienne, infrastructure, ), quantitatif (quadrimoteur, tricyclette ), contradiction ou hostilité (antiféminisme, anti-Clinton ), accord ou sympathie (proactif, pro-vie, pro-Harris )

Verset 7:

Définition du suffixe:
a) lié au terme de base, b) suit le terme de base, c) modifie légèrement le sens du terme de base, d) le plus souvent, il change la catégorie grammaticale du terme de base, e) est univalent, c’est-à dire, les suffixes ont une affinité pour une ou deux classes grammaticales. P. ex. -age et -ing sont des suffixes nominaux (drainage, jogging), tandis que -asser, -iser sont des suffixes verbaux (rêvasser, légaliser).

Verset 8:

Les divers types de suffixes. Je n’ai pas besoin de vous répéter les exemples. Notez pourtant que les catégories qui prennent les suffixes sont toutes des catégories lexicales (nom, adjectif, verbe, adverbe). La préfixation et la suffixation ne s’appliquent pas normalement aux pronoms, prépositions, conjonctions et déterminants, qui sont des morphèmes ayant une valeur grammaticale. Voir, cependant, le verset 11 (création de prépositions et pronoms composés).

Verset 9:

La composition combine deux noyaux lexicaux en une unité de sens nouvelle, appelée mot composé. Les deux composantes ont un poids à peu près égal. Le sens du mot composé dépasse souvent la simple somme de ses deux noyaux, p. ex. un croque-monsieur ou un croque-madame «types de sandwich à la française). En plus, les mots composés français montrent une grande motivation ou transparence sémantique. P. ex., pomme de terre «pomme qui vient de la terre», planche à voile «planche équipée d’une voile». Souvent, ces mots reflètent des innovations technologiques ou culturelles, une navette spatiale, un disque compact, un porte-avions, un tapis à souris, un disque dur, un logiciel de traitement de texte.

Verset 10:

Les mots composés nominaux… différentes formules sont possibles. à noter que les composés dont le premier terme est un nom ont le genre de ce nom (un arc-boutant) et que les composés dont le premier terme est un verbe ont le genre masculin (un porte-avions, porte-monnaie, porte-parole, portefeuille, pare-chocs, aide-mémoire, laisser-passer, savoir-vivre, va-et-vient). Question: Quel genre donne-t-on aux mots porte-fenêtre, pause-café. Question: Ajoutez un autre terme à chaque liste du verset 10.

Verset 11:

Ce verset est là pour vous prouver que la composition peut dépasser les limites du nom, du verbe et de l’adjectif. S’assurer qu’on comprenne tous les termes.

Verset 12:

La cohésion des mots composés. Les composés français sont des groupes figés. On dira, p. ex. la grand’mère, par lequel on ne veut sûrement pas dire qu’il s’agisse d’une mère qui est grande. On ne peut pas y substituer l’adjectif énorme, sans en détruire le sens: l’énorme mère. Les vrais mots composés sont lexicalisés et figurent dans un bon dictionnaire. P. ex. grand’mère figure dans un dictionnaire mais grand arbre n’y est pas. De même, pomme de terre et bureau de poste y figurent, mais il est douteux qu’on y retrouve pomme de l’air, pomme de mer ou bureau de Noël Corbett, mots qui n’ont pas encore été lexicalisés.

    • Le mot composé se comporte comme s’il était question d’une entité unique (une seule chose ou un seul concept). Il peut se remplacer par un mot simple (mange tes pommes de terre = mange tes patates). Souvent dans d’autres langues le mot composé est remplacé par un mot simple. Cf. Fr. pomme de terre, Qc patate, E. potato, All. Kartoffeln.
    • Pour déterminer le degré de cohésion d’un mot composé, on applique les tests (procédés) de commutation, d’expansion, de coordination, d’insertion et de reprise partielle.
    • La commutation: Les mots composés n’acceptent pas la commutation (= substitution, remplacement) des termes du bloc. Ex. pot-au-feu existe mais *pot-à-l’incendie et *casserole-au-feu seraient rejetés par les locuteurs natifs comme inexistants. De même, on dira croque-monsieur ou croque-madame, mais jamais *croque-bébé ou *croque-escargot.
    • L’expansion: Les mots composés n’acceptent pas les expansions habituelles. On peut dire, p. ex. j’aime les pommes et les oranges et les bananes, mais on ne dira jamais: j’ai un porte-feuilles-et-monnaie-et-chèques.
    • L’insertion: On ne peutrien insérer dans un mot composé. On dira un pot-de-vin «bribe», mais on ne dira jamais *un pot-énorme-de-vin ni *un pot-de-petit-vin.
    • Reprise partielle: En syntaxe normale, on peut renvoyer à un substantif qui est qualifié de différentes façons sans être obligé de le répéter en entier. Renée possède la Renault rouge qui est stationnée à côté de ma Citroën bleu-verte; elle a achetée cette voiture l’année dernière. Mais si l’on traite un mot composé de la même façon on risque d’en changer le sens: J’ai préparé un bon pot-au-feu. *Qu’est-ce que tu penses de mon pot? J’ai acheté un sac de pommes de terre. *Qu’est-ce que tu penses de mes pommes? J’ai placé des traits d’union un peu partout. *Qu’est-ce que tu penses de mes traits?
    • Petite leçon de créativité: À partir d’un nombre limité de lexèmes ou termes de base, il est facile de créer de nouveaux mots, grâce aux procédés de la dérivation et composition, procédés bien ancrés dans la conscience linguistique des francophones.

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